Auteur : Hong Sang-soo , né en 1960 est un réalisateur, scénariste et producteur sud-coréen. Il fait des études à Séoul puis aux États-Unis où il réalise plusieurs courts métrages expérimentaux. Il vit un an en France. Réalisateur très prolixe il a réalisé depuis 1996 son premier long métrage, vingt-cinq films. Il est le cinéaste du quotidien des jeunes Coréens, leurs relations de couple conflictuelles, leur malaise existentiel latent. L’alcool et le sexe tiennent une large place dans son cinéma, qui mêle avec audace poésie et trivialité, abstraction et crudité, mélancolie et humour. Souvent sélectionné dans les festivals internationaux, notamment à Cannes où il a obtenu le Prix Un certain regard pour Hahaha (2010). Il a tourné avec Isabelle Huppert dans In Another Country (2012) et La caméra de Claire (2017). Hotel by the river a obtenu le prix d’interprétation masculine à Locarno 2018 pour Kwon Hae-Hyo. Pour son dernier film qui sortira en septembre, La Femme qui s’est enfuie (2020), il a obtenu l’Ours d’argent du meilleur réalisateur à la Berlinale 2020.
Interprètes : Kwon Hae-hyo (Le poète) ; Kim Min-Hee (Sanghee) ; Song Seon-mi (Yeonju).
Résumé : Un vieux poète, qui loge dans un hôtel au bord d’une rivière, fait venir ses deux fils, pensant que sa fin est proche. Une jeune femme trahie par l’homme avec qui elle vivait vient y trouver refuge et demande à une amie de la rejoindre…
Analyse : Tourné juste après Grass en 2018 et présenté au festival de Locarno, Hotel by the river fait partie, depuis 2017 (Le jour d’après) de la gamme en noir et blanc des films d’Hong Sang-soo. Un noir et blanc somptueux dans lequel il accentue les contrastes puisqu’il filme la neige avec des personnages habillés de noirs qui se détachent dans ce paysage irréel. Dans cet hôtel, lieu de rencontre par excellence, les clients sont rares car c’est le plein hiver. Seuls semble-t-il le poète, hôte invité par le patron de l’hôtel, un admirateur, et deux jeunes femmes dont l’une est venue auprès de son amie pour la consoler d’une déception amoureuse. On retrouve les thèmes chers au réalisateur, avec cette fois-ci le thème de la mort qu’il a peu exploré. Il est également moins tourné vers les relations hommes-femmes et explore davantage les relations familiales. Avec toujours cette poésie du quotidien qu’il sait si bien évoquer, et un sens du dérisoire et de l’anecdotique, il fait évoluer ses personnages dans un univers rétréci à l’essentiel ; la vie dans ce qu’elle a de plus simple, de plus raffiné et de plus âpre, la beauté secrète et mélancolique des choses de la vie. Des sujets chers au réalisateur sont évoqués : les difficultés de la communication entre les êtres. Les fils du vieux poète sont toujours à sa recherche. Dans cet hôtel où la rencontre devrait être facile, ils l’attendent longuement tandis que lui les attend ailleurs, ce qui donne l’occasion aux deux frères d’échanger sur leur vie et de se dire des vérités peu aimables ; le père est insaisissable, rarement aux rendez-vous, injoignable par téléphone. Nous retrouvons également le thème de la répétition, ici de manière nouvelle. Entre les deux histoires parallèles les échos sont nombreux, d’un côté des retrouvailles entre un père et ses fils et de l’autre la réunion entre deux amies. Et bien sûr le thème de la déception amoureuse.
Il y a de la tristesse dans ce film où l’on a l’impression que le réalisateur projette ses propres craintes de la fin de vie, de l’abandon. Comme lui le poète est toujours sensible et séduit par la beauté. Il dit à plusieurs reprises aux jeunes femmes qu’il rencontre combien il les trouve belles et compose pour elles un poème. De leur côté tout est douceur, malgré le chagrin de Sanghee. On les voit souvent dormir dans les bras l’une de l’autre, apaisées. Un petit film, tourné en deux semaines, caméra portée, plein de douceur, de mélancolie et de beauté.