Arnaud Desplechin, né en 1960 est un cinéaste français très prolifique. Il présente à Cannes en compétition officielle Frère et sœur qui est déjà sorti en salle, et qui est son 14ème long métrage. C’est un cinéaste dont on qualifie volontiers l’œuvre de « cinéma d’auteur ». Il a également réalisé des mises en scène de théâtre. Il a reçu de nombreux prix cinématographiques liés à la catégorie Art et Essai dont le prix Louis-Delluc en 2004. Avec son premier-long métrage, La Sentinelle (1992), coécrit par Pascale Ferran et Noémie Lvovsky, Desplechin est propulsé chef de file d’une nouvelle génération de réalisateurs, dont les maîtres ont pour noms Resnais ou Truffaut. C’est le cinéma d’un auteur intellectuel qui est généralement très réjouissant pour l’esprit. Frère et sœur, histoire d’une haine terrifiante entre un frère et une sœur est bien dans sa lignée. C’est un film très écrit où l’on retrouve son gout pour l’art, la littérature (le personnage principal est écrivain), le théâtre, par exemple l’utilisation de la voix off des deux héros les place à la fois comme acteurs et spectateurs de leur drame familial. Toutefois on ne connait pas l’origine de cette haine ravageuse et explosive, peut-être une vague jalousie de la sœur, et c’est gênant car elle en devient, de ce fait, excessive. Les acteurs donnent l’impression de surjouer leurs sentiments. Les critiques sont bonnes dans l’ensemble. Personnellement je ne trouve pas que ce soit le meilleur de ce réalisateur et j’avoue même avoir été assez déçue.
Cinq ans après sa Palme d’or pour The Square, Ruben Östlund revient défendre en compétition sa vision désespérée de l’espèce humaine dans Triangle of sadness. Ce réalisateur, né en 1974 est également scénariste, monteur et directeur de la photographie suédois. Il avait obtenu le prix du jury de la section Un certain regard à Cannes 2014 pour son film Snow Therapy. Dans son dernier film il s’attaque à l’univers de la mode, du luxe et des apparences. Yaya et Carl un couple de mannequins, sont invités à participer à une croisière de luxe pour ultra-riches sur un immense yacht. Ils y croisent des riches, plus caricaturaux les uns que les autres, un oligarque russe puant de suffisance et ses deux femmes, un couple de vieux Anglais ayant fait fortune dans la vente d’armes, un capitaine alcoolique et … marxiste. Bref une farce volontairement grotesque, une satire radicale d’un monde fait de vanité, d’excentricité, avec des demandes ahurissantes qui sont aussitôt satisfaites (par exemple, des pots de Nutella livrés par hélicoptère !). Le film est divisé en trois parties. Il aborde dans la première les problèmes de couple et d’égalité entre les sexes, sur un mode bien entendu caricatural, dans la seconde c’est la fameuse croisière dans laquelle il fait la critique acerbe d’une société au luxe indécent, et dans la troisième, la plus faible à mon sens, après le naufrage quelques passagers se retrouvent sur un île déserte où les rapports sociaux et de genre s’inversent. Un film réjouissant, par un réalisateur au regard impitoyable, où l’on rit beaucoup et qui devrait figurer au palmarès ; avec un petit bémol toutefois, il a une demi-heure de trop.