Auteurs ; Dayna Goldfine est une réalisatrice, productrice et scénariste. Elle travaille avec Daniel Geller qui est directeur de la photographie, producteur et réalisateur. Il et elle sont auteur et autrice de films sur la danse, Isadora Duncan: Movement from the Soul (1989), Ballets russes, sur l’émergence du capital-risque américain, Something Ventured (2011), sur l’art comme porte de sortie du ghetto Kids of Survival (1997), couronné d’un Emmy Award. Tous les deux se sont longtemps concentré.e.s sur Hallelujah, Les mots de Leonard Cohen, fasciné.e.s par ce troubadour des temps modernes.
Résumé : Le parcours de l’un des artistes les plus importants de notre époque à travers la genèse de sa chanson qui est devenue un tube planétaire, Hallelujah.
Analyse : Si vous aimez Leonard Cohen, si vous êtes nostalgique de cette époque, et surtout si vous aimez la sublime chanson Hallelujah, allez voir ce documentaire Hallelujah, les mots de Leonard Cohen. Un documentaire de deux heures qu’on ne voit pas passer (fait exceptionnel, personne n’a quitté la salle avant la toute fin du générique) qui nous raconte dans la première heure Leonard Cohen (1934-2016). Comment ce romancier et poète canadien est devenu par hasard chanteur. Venu parler de son livre « Beautiful Losers » à la télévision canadienne en 1966, le présentateur lui a demandé de chanter. Leonard Cohen est né. Par de multiples témoignages passionnants de ses intimes, des femmes qui l’ont aimé ou de ceux qui l’ont aidé sur le plan professionnel, on découvre un homme à la personnalité singulière, tourmenté, mystique, imprégné d’une culture juive nourrie de textes sacrés (un grand père rabbin), amoureux des mots, séducteur et terriblement séduisant. Un parcours avec des joies, des dépressions, un long séjour zen en 1994 au monastère Mount Baldy. On vibre à ses concerts et notamment au dernier en 2013, à ses ultimes tournées à partir de 2004, retour forcé sur scène à la suite d’une escroquerie qui le laisse sans le sou à l’âge de 70 ans. Un moment très émouvant lorsqu’à la fin d’un concert en Israël il adresse une prière en hébreu à la foule en lui souhaitant la paix, Shalom.
La deuxième heure est davantage consacrée à l’histoire de la chanson Halleluyah devenue un hymne planétaire. Leonard Cohen a mis des années, environ 7 ans, à écrire entre 150 et 180 couplets, écrivant, réécrivant, raturant, sur de petits carnets que les réalisateurs ont pu obtenir, avant de trouver les accords secrets, la bomme rime, le bon rythme, le texte parfait. Une chanson qui a failli ne jamais exister. Malgré les efforts de l’excellent John Lissauer, son producteur, la firme Columbia dont on peut apprécier le côté visionnaire, a refusé son album qui est sorti quelques années plus tard, en 1984, dans une firme mineure en Grande Bretagne. La fortune de ce titre est due à sa reprise par Bob Dylan, John Cale, Jeff Buckley et jusque dans la BO du film d’animation « Shrek », dans une version de Rufus Wainwright. Ce hymne sublime a fini par devenir le tube que l’on sait – massacré dans tous les mariages, les télé-crochets du monde entier, en toutes occasions. Mais rien n’égale l’interprétation qu’en fait Leonard Cohen lui-même qui, avec sa voix rocailleuse, la chante comme une prière mélangeant le profane et le sacré.
Certes, du point de vue cinématographique, c’est un documentaire très classique enchainant les interviews et les archives. Mais quand le fond est tellement passionnant, qu’importe la forme qui, au demeurant, est pertinente et n’a rien de désagréable. Reste à s’interroger sur le pourquoi du succès populaire de cette chanson. Une explication me vient à l’esprit : elle élève l’âme.