Jonathan Glazer, né en 1965 est un réalisateur britannique. Il est auteur de clips et courts métrages. C’est en 2013 que le réalisateur s’est fait véritablement connaitre avec Under the Skin. Il s’est fait discret depuis et son retour était très attendu. Il présente The Zone of Interest, son 4ème long métrage en compétition pour la Palme. La zone of interest est cette zone qui entoure un camp de concentration. Là vivent le commandant d’Auschwitz Rudolf Höss et sa femme Hedwig. Ils construisent une vie agréable pour leur petite famille dans un pavillon coquet avec jardin, piscine, serre et verger. Le Paradis aux portes de l’Enfer en quelque sorte. Des enfants blonds rient, s’amusent, on reçoit des amis, on mange, on boit, on part au bord du lac proche piqueniquer. La vie est belle.
On peut être traumatisé par des images des camps de concentration. Mais on l’est tout autant quand rien n’est montré mais suggéré. C’est la grande force de ce film : l’horreur voisine n’est jamais dévoilée mais toujours devinée par des bruits, des sons, des cris parfois, des odeurs sans doute car on voit la fumée qui s’échappe d’une cheminée du camp depuis la maison. Mais rien ne vient perturber ce petit monde qui semble s’être parfaitement habitué à cet environnement. Plus glaçantes encore sont les discussions menées par Höss et des dignitaires nazis qui conçoivent l’extermination comme une entreprise avec des problèmes de rentabilité, d’augmentation du chiffre. Par exemple ils reçoivent un chef d’entreprise qui leur propose une amélioration du rendement des fours crématoires en agrandissant ceux-ci… à frémir. Le film présente Madame si contente du paradis de carte postale qu’elle a bâti qu’elle ne veut le quitter à aucun prix, même lorsque son mari est muté ailleurs. Nous sommes au-delà des limites de l’humanité, au cœur de ce que Hanna Arendt a nommé « la banalité du mal ». Un sentiment d’irréalité nous saisit. Comment est-ce possible ? Le réalisateur a fait le choix, prôné par Claude Lanzmann, de ne faire aucune fiction sur les camps. Le résultat est un film vertigineux, terrifiant qui distille avec virtuosité, spécialement dans sa forme, l’ignominie dans le banal du quotidien.
Karim Aïnouz, est un réalisateur et artiste visuel brésilien. Il est l’auteur de plusieurs courts et longs métrages. Parmi ceux-ci les plus notables sont Madame Satã (2002) qui a été sélection à Cannes dans la sélection Un certain regard. De même La Falaise enchantée, présentée à la Quinzaine des réalisateurs en 2011. En 2019 il a reçu le prix Un certain regard pour la Vie invisible d’Euridice Gusmão. Il présente cette année en sélection officielle Firebrand (Le jeu de la Reine). Katherine Parr est la sixième femme du roi Henri VIII (1491-1547), dont les précédentes épouses ont été soit répudiées, soit décapitées. Pendant sa régence alors que le roi va combattre François 1er , elle veut faire progresser le royaume et est attirée par les nouvelles thèses de la Réforme. Elle est en butte à l’évêque Etienne Gardiner qui convainc le roi de l’hérésie de sa femme. Ce film d’époque et en costumes ne s’attache pas à l’histoire des guerres et des conquêtes, mais à l’histoire intime du roi et aux intrigues de cour. Le suspens est parfaitement soutenu pendant le film. La reconstitution est brillante avec le parti pris de mettre en valeur les femmes et particulièrement Katherine Parr. Mais rien qui n’ait déjà été vu et revu.