Auteur : Barbet Schroeder est un réalisateur et producteur suisse né en 1941. Il fait ses études en France et devient assistant stagiaire de Jean-Luc Godard avec lequel il participe à la Nouvelle vague. À 22 ans il fonde la société Les Films du Losange. Ses premières réalisations sont More (1969) et La Vallée (1972), deux films emblématiques de la culture hippie, avec la musique des Pink Floyd. Sa filmographie comprend plus d’une vingtaine de titres dont Maîtresse (1976) avec Bulle Ogier, sa femme, et Gérard Depardieu, The Charles Bukowski Tapes (1987), Le Mystère von Bülow (1990), Amnesia (2015). Il réalise une trilogie du mal, le premier film étant Général Idi Amin Dada, Autoportrait, le second L’avocat de la terreur sur Jacques Vergès, le troisième Le vénérable W sur un vénérable bouddhiste à l’origine des massacres contre les Rohingyas. Il présente dans Ricardo et la peinture un documentaire intimiste sur la vie du peintre Ricardo Camillo.
Résumé : Barbet Schroeder offre un portrait et une plongée dans l’intimité de Ricardo Cavallo, illustre peintre argentin et ami de longue date du réalisateur. Arrivé en France en 1976, Ricardo vit depuis 2003 à Saint-Jean-du-Doigt (Finistère), après avoir vécu longtemps à Paris.
Analyse : Un merveilleux documentaire sur la peinture, qui apprend à l’aimer et à la regarder. Ricardo Cavallo est un artiste très prolifique qui sait parler de son art et des émotions qu’il éprouve devant un tableau. D’une culture immense en matière d’histoire de l’art il compare certaines toiles de la renaissance italienne ou de l’impressionnisme français à une sculpture aztèque. Il nous parle avec une passion qu’il sait transmettre de La Forge de Vulcain de Velasquez, son maître, de l’émotion à l’origine de sa vocation en voyant ce tableau qu’il analyse finement pour nous. Il nous parle également du Caravage, de Delacroix, de Monet, tandis que leurs œuvres sont à l’écran, avec une finesse qui force l’admiration. Un véritable cours d’histoire de l’art, des peintures rupestres des hommes de la préhistoire, aux portraits funéraires en Égypte, aux natures mortes du Caravage, en passant par Braque et Picasso. Un bain de beauté et d’intelligence. Retiré en Bretagne, sa passion de l’art l’a amené à ouvrir une école d’art gratuite dans laquelle il initie des enfants au dessin et à la peinture. Barbet Schroeder, qui à travers ses 82 ans a conservé le même sourire charmeur et la même curiosité pour l’art, est l’ami de Ricardo Cavallo depuis une quarantaine d’années. Il l’a connu alors qu’immigré argentin sans le sou, le peintre peignait dans une chambre de bonne à Neuilly-sur-Seine, se contentant de petits boulots pour vivre de riz et d’oranges. La vue au loin sur les frondaisons des arbres du bois de Boulogne aidaient son inspiration. Cette vieille amitié autorise le réalisateur à apparaître dans le champ, à laisser une perche trainer dans l’image, avec cette décontraction touchante qu’autorisent l’intimité, la complicité, et l’admiration. Ils parlent le même langage et on les voit d’un œil attendri, bras dessus bras dessous, parcourir le Louvre dont Ricardo commente abondamment les tableaux. Le réalisateur suit au plus près le peintre, l’accompagnant parfois dans ses déplacements, descendant une falaise escarpée, matériel au dos, pour atteindre une grotte dans laquelle il peint indéfiniment des œuvres gigantesques qu’il réalise par petits tableaux de 30/30, assemblés comme un puzzle et qui peuvent être interchangeables. Dans certaines œuvres il les a placés de manière aléatoire, donnant au paysage un aspect déstructuré. Ce documentaire sur ce peintre qui ne vit que pour son art est un vrai bonheur dont on ne devrait pas se priver.