Autrice : Luàna Bajrami est née en 2001 au Kosovo. À 7 ans, elle quitte son pays natal avec ses parents pour s’installer en France. Elle se prend alors de passion pour la comédie après avoir vu le film Les enfants de Timpelbach de Nicolas Bary. À 10 ans, elle obtient son premier rôle à la télévision dans Le Choix d’Adèle. Elle étudie le théâtre au Conservatoire de Limeil-Brévannes. En 2016, elle obtient le rôle de Marion dans le téléfilm Marion, 13 ans pour toujours. Trois ans plus tard, elle joue à nouveau dans L’heure de la sortie de Sébastien Marnier. Toujours en 2019, l’actrice s’illustre en donnant la réplique à Adèle Haenel et Noémie Merlant dans Portrait d’une jeune fille en feu, pour lequel elle obtient une nomination pour le César 2020 du meilleur espoir féminin. Elle joue également dans Fête de famille de Cédric Kahn. Elle passe à la réalisation avec le court métrage En été mûrissent les baies (2019), puis son premier long métrage La colline où rugissent les lionnes, sélectionné à la Quinzaine des réalisateurs à Cannes 2021. Notre monde a été présenté en sélection officielle à la Mostra de Venise 2023.
Interprètes : Albina Krasniqi (Volta) ; Elsa Mala (Zoé) ; Aurora Ferat (Flora).
Résumé : Kosovo, 2007. Zoé et Volta quittent leur village reculé pour intégrer l’université de Pristina. À la veille de l’indépendance, entre tensions politiques et sociales, les deux jeunes femmes se confrontent au tumulte d’un pays en quête d’identité dont la jeunesse est laissée pour compte.
Analyse : Luàna Bajrami nous offre à 23 ans son second long métrage qui confirme un talent qu’on avait pu apprécier dans sa précédente œuvre, La colline où rugissent les lionnes. La réalisatrice revient sur le sujet de l’émancipation. Zoé et Volta, deux jeunes cousines inséparables, vivent dans un village perdu du Kosovo, patrie de la réalisatrice, qui a connu 8 ans de guerre. Elles sont inséparables et rêvent d’un autre avenir que celui que leur promet leur famille : le patriarcat profondément ancré dans une société musulmane, le mariage arrangé, sinon forcé. Volta a la chance d’avoir la voiture de son père qu’elle sait conduire. Elles ont dix-huit ans et décident de fuir une nuit vers la capitale, pour intégrer l’université de Pristina, dans un geste d’une liberté folle et jouissive. Elles partagent la même chambre à la cité universitaire et sont d’une formidable complicité, même si très vite on voit une différence de caractère entre les deux, Volta se voulant plus sage et plus raisonnée que Zoé. Elles souhaitent entreprendre des études d’anglais pour Zoé qui veut devenir interprète, et d’économie pour Volta. Mais rapidement les désillusions arrivent. Dès l’inscription une secrétaire désabusée douche leurs espoirs. Elles découvrent un pays qui connaît une atmosphère de guerre civile avant son indépendance, complètement désorganisé, avec une économie sinistrée, incapable de répondre aux besoins de sa jeunesse. De nombreux cours n’ont pas lieu car les professeurs sont absents et l’université vit dans un climat de contestation et de désillusions. Mais malgré ce climat délétère pour une jeunesse désemparée qui cherche en vain son avenir, le mérite de la réalisatrice est de laisser poindre l’espoir. Un film de courage et d’émancipation d’une jeunesse qui refuse d’être la génération sacrifiée et qui avec ténacité et un certain optimisme aspire à la joie et se débrouille en s’organisant dans ce chaos ambiant. Un beau film, généreux et plein d’espoir, porté par deux actrices lumineuses, qui choisit de montrer la voie de la liberté.