Emilia Perez

Auteur : Fils du réalisateur et dialoguiste Michel Audiard, Jacques Audiard, né en 1952, se destine au professorat, mais après des études de Lettres avortées, il se lance dans le cinéma et débute comme monteur. Au début des années 80, il s’essaie avec succès à l’écriture de scénarios. Il passe à la mise en scène en 1994 avec Regarde les hommes tomber. Le film remporte le César du Meilleur premier film ainsi que le prix Georges-Sadoul. Deux ans plus tard, le cinéaste réalise, Un héros très discret (prix du Meilleur scénario au festival de Cannes 1996). Il met cinq ans pour réaliser son film suivant, Sur mes lèvres. Ce troisième film remporte aux César le prix du Meilleur scénario. Vient ensuite De battre mon cœur s’est arrêté (2005). Quatre ans après il réalise Un prophète. Le film remporte le Grand Prix au festival de Cannes 2009 et récolte neuf César dont celui du Meilleur réalisateur, ainsi qu’une nomination pour le Meilleur film étranger aux Oscars. Suit De rouille et d’os (2012). Trois ans plus tard, le metteur en scène présente à Cannes son drame Dheepan pour lequel il reçoit la Palme d’or. Emilia Perez, son 10ème long métrage, était en compétition officielle à Cannes 2024 et a remporté, chioe exceptionnelle, deux prix ; le prix d’interprétation féminine pour ses trois actrices et le Prix du Jury.

Résumé : Surqualifiée et surexploitée, Rita use de ses talents d’avocate au service d’un gros cabinet plus enclin à blanchir des criminels qu’à servir la justice. Mais une porte de sortie inespérée s’ouvre à elle, aider le chef de cartel Manitas à se retirer des affaires et réaliser le plan qu’il peaufine en secret depuis des années : devenir enfin la femme qu’il a toujours rêvé d’être.

Interprètes : Zoé Saldana (Rita Moro Castro, l’avocate) ; Karla Sofia Gascón (Emilia Perez); Selena Gomez (Jessi) ; Adriana Paz (Epifania).

Analyse : Jacques Audiard tout en retrouvant ses thèmes chers, les gangsters, s’essaie à un genre très différent : la comédie musicale, non sans panache. On peut saluer l’audace de ce cinéaste qui a toujours su se réinventer. Une comédie musicale originale qui est aussi mélodrame queer et un film noir. Aidé par une très belle chorégraphie du franco-belge Damien Jalet dans laquelle consommateurs de restaurant, badauds, femmes de ménage, se transforment en danseurs, aidé également par la belle musique de Camille et Clément Ducol, ce film est un vrai plaisir. Le réalisateur maîtrise parfaitement un genre qui ne lui est pas familier. C’est une véritable proposition de cinéma qui a provoqué une belle réaction du public cannois, avec un montage éblouissant, des séquence impressionnantes comme l’assaut final dans la maison isolée. De plus, il traite de problèmes sérieux actuels : c’est un film de femmes, avec ses trois magnifiques actrices, dans lequel sont traitées les questions de genre et d’identité, Me-Too, la place des femmes dans un monde dominé par les hommes, la violence conjugale. Le rôle des hommes n’est pas pour autant nié. 

Le réalisateur est fasciné par le romanesque, le tragique qui parcourt tous ses films. L’ajout de la musique ajoute un plus, et même si certains morceaux sont inégaux, l’ensemble est très plaisant à écouter. Devenu femme, Manitas réincarné en Emilia Perez (magnifiquement jouée par un acteur espagnol, Gascon, devenu dans la vraie vie la pulpeuse et charismatique Karla Sofía Gascon), va créer une association pour aider les familles à retrouver leurs proches enlevés par les narcotrafiquants et disparus. Mais le film n’est pas à l’abri des rebondissements. Sans les dévoiler nous poserons seulement la question : peut-on être sans avoir été ? 

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