Auteur : Damiàn Szifron est un jeune réalisateur argentin de 39 ans. Les Nouveaux Sauvages est son troisième long métrage après El fondo del mar (2003) et Tiempo de valientes (2005). Son dernier long métrage a été présenté au dernier festival de Cannes. Szifron est surtout connu en Argentine pour sa création d’une série télévisée en 2002 « Los Simuladores ». Son film est en compétition pour le prix Goya du meilleur film en langue étrangère.
Résumé : Sur un mode humoristique grinçant six histoires dans lesquels les personnages sont confrontés à des situations insupportables qui réveillent leur violence ; dans un avion les passagers découvrent qu’ils ont une connaissance en commun ; une querelle entre deux automobilistes ; dans un restaurant la serveuse reconnaît l’homme qui a provoqué la ruine et le suicide de son père ; un ingénieur, marié et père de famille, se révolte contre l’absurdité de l’administration ; le fils d’une riche famille provoque un accident mortel avec la voiture de son père ; le jour de son mariage la mariée découvre que son mari l’a trompée avec une convive présente.
Analyse :
Almodovar qui a produit le film avec son frère ne l’a certainement pas renié. On retrouve dans les personnages du film de Szifron la même énergie, la même folie latente, les mêmes « crises de nerf » que chez son ainé.
Dès le prologue le rire s’installe et le public de Cannes n’a pas boudé son plaisir. Petit à petit, à la manière d’un roman d’Agatha Christie, on découvre que tous les passagers ont un lien commun avec un certain Pasternak. La suite, nous ne la dirons pas, mais elle donne le ton du film, drôle mais d’un rire qui est parfois grinçant et souvent noir. Les personnages sont souvent affreux et méchants, et la traduction française du titre est une allusion claire aux Monstres et Nouveaux Monstres d’un certain Dino Risi. Dans une Argentine en crise Szifron a voulu, en essayant de nous faire rire, mais pas toujours, nous montrer comment dans une société bloquée, où la corruption et les passe-droits écrasent les citoyens, où le sentiment d’humanité n’a plus aucune place, un incident parfois mineur peut provoquer un déchainement d’une violence inouïe et qui est à toujours à fleur de peau. L’État, la justice, la police, les riches, en prennent pour leur grade.
Certes, le film n’échappe pas à la critique que l’on peut faire aux films à sketches : ils sont inégaux. Oui, certaines histoires sont drôles, d’autres moins, certaines sont très bonnes, d’autres un peu moins. Mais ce n’est pas nécessairement un reproche car, ayant un seul réalisateur, le film a dans son ensemble une unité de ton et de rythme, une mise en scène efficace avec un montage très énergique. Il est traversé par un fil rouge, une idée simple : quel que l’on soit, bon, méchant, simple, cultivé, riche ou pauvre, victime ou bourreaux, nous risquons tous de finir un jour dans une explosion de haine et de mort et de verser dans la barbarie la plus extrême. Mais certains récits, et le dernier en particulier, nous montrent aussi qu’après ces déchainements paroxystiques, l’amour et le pardon peuvent retrouver leur place. Rien n’est perdu !