Auteur : Samuel Collardey, né en 1975 est un directeur de la photographie et réalisateur français. Il travaille durant quatre ans pour la télévision avant d’intégrer l’école de cinéma La Fémis dans le département Image. Durant sa formation il est chef opérateur sur de nombreux courts métrages. Son film de fin d’étude Du soleil en hiver(2005)reçoit de nombreux prix, dont le prix SACD à la Quinzaine des réalisateurs du Festival de Cannes, le prix spécial du jury à Clermont-Ferrand. En 2008 sort son premier long métrage L’Apprenti un docu-fiction qui fait le portrait d’un jeune apprenti dans une ferme du Haut-Doubs. Le film est récompensé par le Prix de la semaine de la critique à la Mostra de Venise et le Prix Louis-Delluc du meilleur premier film. Il réalise également deux autres longs métrages, en 2013 Comme un lion puis en 2015 Tempête. En parallèle, il continue de pratiquer le métier de chef opérateur. En 2018 Une année polaire obtient le Prix du jury au Festival 2 cinéma de Valenciennes.
Résumé :Pour son premier poste d’instituteur, Anders choisit l’aventure et les grands espaces, plutôt que de reprendre la ferme familiale ; il part enseigner au Groenland à Tiniteqilaaq, un hameau inuit de 80 habitants. Dans ce village isolé du reste du monde, la vie est rude, plus que ce qu’Anders imaginait. Pour s’intégrer, loin des repères de son Danemark natal, il va devoir apprendre à connaître cette communauté et ses coutumes.
Analyse : Il semble être de mode de réaliser des fictions à partir de faits réels en faisant jouer aux acteurs non professionnels leur propre rôle. Mais Samuel Collardey ne sacrifie pas à la mode car c’est le cœur de sa filmographie depuis maintenant quatre films. Dans son court métrage Du soleil pour l’hiver (2005), puis dans ses longs métrages L’Apprenti(2008), Tempête(2015) et aujourd’hui Une année polaire, il reconstitue par la fiction d’authentiques histoires personnelles. Les valeurs de transmission et de partage l’intéressent particulièrement. Ici c’est une transmission à double sens : l’enseignement en danois que voudrait imposer Anders à ses élèves inuits qui se révèlent difficiles et se moquent de lui dans leur langage qu’il ne connaît pas, mais surtout celui que cette communauté va lui apporter en lui apprenant à voir le monde autrement qu’à travers son propre héritage culturel. Le réalisateur nous montre que le secret d’une intégration réussie passe par l’acceptation et l’adoption du mode de vie de ceux avec lesquels on est appelé à vivre. Au début, suivant les conseils de l’employée chargée du recrutement, il se refuse à apprendre le langage inuit. Mais Anders a suffisamment d’intelligence et de sensibilité pour comprendre que l’attitude de celui qui arrive en conquérant avec les clichés et les préjugés de sa culture danoise est intenable. Progressivement il va se faire adopter par cette communauté, apprendre leur langage, leurs coutumes, apprendre à chasser le phoque et dans de longues expéditions à traineaux dans une neige immaculée, à chasser l’ours blanc. Il va comprendre également que l’obligation de l’école, comme l’impose la loi danoise n’est peut-être pas le seul mode d’éducation. A travers le quotidien d’Asser, un gamin attachant, il va accepter que savoir pêcher le saumon ou le phoque, savoir construire un traineau, savoir faire un harnais de cuir pour les chiens de traineau est tout aussi important que de savoir lire et écrire. Le film est de ce point de vue passionnant par cette plongée dans le quotidien de la communauté des Inuits. Collardey nous fait également comprendre que le Groenland n’est pas un territoire danois mais une colonie danoise.
Vous serez, dans ce beau film, dépaysés et enchantés par une nature magnifique, par les panoramiques de paysages sauvages de neige immaculée, avec des plans en plongée de toute beauté sur une longue course de traineau sur une neige vierge de toute présence humaine que seules les traces d’un ours blanc viennent marquer.
Ça tombe bien je pars au Groenland bientôt. A voir avant le départ..