Auteur : Christian Duguay est un réalisateur, directeur de la photographie, monteur et compositeur québécois, né en 1957 à Montréal.
Réalisateur de téléfilms plutôt violents et directeur de la photographie de séries B d’action, Christian Duguay signe son premier film pour le grand écran en 1991 : Scanners 2: The New ordre, suite du film choc de David Cronenberg. Le metteur en scène est par la suite remarqué avec Planète hurlante, série B de science-fiction. En 2000, Christian Duguay signe L’Art de la guerre avec Wesley Snipes, relatif succès aux États-Unis, puis poursuit, toujours dans le style musclé et pour les amateurs de sensations fortes, avec The Extremists. Christian Duguay se consacre grandement à la mise en scène pour la télévision et revient au cinéma en 2013 avec Jappeloup qui raconte la véritable histoire entre le cavalier Pierre Durand joué par Guillaume Canet et son cheval imprévisible. Il est ensuite choisi pour réaliser un autre film centré sur un animal exceptionnel : Belle et Sébastien, l’aventure continue suite du film de Nicolas Vanier. Il réalise en 2016 Un sac de billes.
Résumé : Un sac de billes est tiré du roman de Joseph Joffo paru en 1973 dans lequel il raconte un épisode de son enfance avec son frère durant l’occupation allemande.
Analyse : Contre l’oubli, contre l’antisémitisme rampant qui semble vouloir renaître aujourd’hui, contre les négationnismes de tous poils ce film est une œuvre nécessaire.
Dans une mise en scène certes classique mais efficace, Christian Duguay nous montre comment des familles juives se sont retrouvées dispersées malgré elles, comment le courage a été chez certains un acte d’héroïsme ordinaire, comme celui des parents de Maurice et Joseph Joffo qui n’ont pas hésité à faire partir en zone libre leurs deux adolescents de 11 et 14 ans seuls avec un peu d’argent et des recommandations. Nous suivons le périple des ces deux jeunes garçons, si attachants, dans des paysages magnifiques, car ils seront obligés de faire une partie du trajet à pied, nous vivons leur peur et leurs inquiétudes tempérées par l’insouciance de l’enfance. Nous partageons à leur côté de grands moments d’émotion, en particulier lorsque le petit Joseph, à l’annonce de la libération de Paris, peut enfin crier à la face du monde « Je suis juif » tandis que son père, pour le protéger, le lui avait interdit.
Malgré la cruauté des situations vécues le parti pris par le réalisateur n’est pas de nous donner un film noir et désespérant. Il y a de la lumière, il y a aussi des moments de bonheur intense lorsque la famille se retrouve réunie à Nice et passe l’après-midi à la plage, il y a l’innocence des enfants avec leur naïveté touchante mais qu’ils apprendront à taire, il y a également des êtres courageux qui donnent espoir : toute la chaine de ceux qui se sont mobilisés pour les aider, parfois moyennant finance mais sans les voler ; ces prêtres qui les ont cachés au péril de leur vie, ces directeurs de centres qui ont veillés sur eux, face à ces pétainistes enragés qui qualifient les juifs de « vermine à exterminer » devant le petit Joseph qui a appris à ne plus réagir.
Ce film est servi par d’excellents interprètes ; Batyste Fleurial et Dorian Le Clech, les deux jeunes héros sont d’une merveilleuse complicité et entrent parfaitement dans leur rôle. Patrick Bruel est émouvant dans le rôle du père attentif et aimant, écrasé par le poids de la conscience du danger. Elza Zylbertein est lumineuse dans son rôle de mère très présente mais qui a su s’effacer.
Certains seraient tentés de qualifier ce film de « tire larmes », tant les moments d’émotion sont intenses. Mais comment l’éviter sur un sujet pareil ? Et personnellement je ne pense pas que ce soit une critique. Un bémol cependant : la musique aurait pu être moins présente.
Ce film, témoignage du passé mais également du présent, a reçu le soutien de la fondation pour la Mémoire de la Shoah.